Pendant mon voyage en TGV partant à 7h
15 de la gare Montparnasse et qui doit m'amener à Hendaye à 12h 40,
j'ai le temps de réfléchir à ce que j'entreprends. Je me pose beaucoup
de questions. La première est de savoir si j'aurai la force et la santé
pour accomplir cette grande traversée des Pyrénées. Il y a bien
longtemps que je n'ai pas randonné avec plus de 15kg sur le dos. J'ai
choisi la liberté, celle-ci a un prix. Il me faudra tous les jours
monter et démonter la tente, assurer l'intendance pour la nourriture,
la toilette etc... J'ai l'intention d'utiliser au minimum les refuges
et hôtels autrement que pour me restaurer.
9 Juillet 2008 - Hendaye -> Col de
Luziniaga
Mon premier campement.
Il
fait
très beau au cours de cette première journée mais "ça ne va pas durer"
comme dirait ma femme qui est normande...
Le
train
arrive comme prévu à Hendaye à 12h 40. Je sors de la gare et je mets en
marche mon GPS. Là, ça commence mal. N'ayant pas acheté les cartes
d'Espagne pour le GPS et étant très près de la frontière, je n'arrive
pas à faire apparaître mon trajet sur l'écran. Je dois donc sortir mon
guide et tenter de trouver mon chemin pour sortir de la ville. Il fait
très chaud et la route monte beaucoup. J'ai peut être été optimiste en
envisageant de parcourir la première étape de 7h en partant à 14h.
Enfin, j'essaierai de trouver un endroit pour camper. J'ai dans mon sac
assez de nourriture pour au moins 2 jours.
Mon
sac
est lourd, il fait chaud, je m'inquiète de savoir si je pourrai réussir
mon projet. Enfin vers 19h je cherche les 4 mètres carrés de terrain
plat et horizontal pour planter ma tente et je m'installe sur le bord
du chemin. Celui-ci me parait peu passant, je ne devrais pas être
dérangé.
C'est
une première aussi, la nuit sous la tente. Le matelas est bien mince et
mon dos est mis à rude épreuve.
10 Juillet 2008 - Col de Luziniaga ->
Elizondo
La Rhune (900m) vue de mon premier camping.
J'ai passé une bonne
première nuit sous ma tente aidé sans doute par la fatigue. Le temps
est toujours au beau fixe et c'est avec optimisme que je pars vers 7h
pour ma deuxième étape. Je suis à 2h environ du terme de ma première
étape (Le col de Luziniaga).
Cette étape sera
finalement assez pénible. Il fait chaud et le sac se fait lourd. Je
n'ai plus l'habitude de marcher avec un tel poids sur les épaules. Je
m'arrête souvent et au fil de la journée mon moral au beau fixe du
matin s'émousse. De plus en Espagne toujours à cause de mes cartes
manquantes sur le GPS, je fais deux erreurs d'orientation. C'est
vraiment très pénible psychologiquement de devoir revenir en arrière
après un gros effort de montée. Enfin, vers 19h je trouve un endroit
sympathique pour planter la tente à 1/2 heure environ du terme de ma
deuxième étape. Là, il y a une fontaine une belle pelouse et quelques
arbres pour faire de l'ombre. Il y a aussi un groupe de quatre jeunes
français (3 garçons et une fille) avec lesquels je sympathise. Ils
commencent eux aussi la HRP et ils semblent aussi fatigués que moi, ça
me rassure un peu quelque part. La vie redevient belle.
Mon deuxième camping.
11 Juillet 2008 - Elizondo -> Les
Aldudes
Les Aldudes.
Ce
matin
là, je pars vers 7h, sans attendre les jeunes qui vont sans doute
tarder à se lever. Je descends vers le bourg d'Elizondo et j'ai bien du
mal à trouver mon chemin pour en partir. Les explications du guide ne
sont pas claires. Finalement, j'en partirai par une mauvaise route qui
m'obligera à marcher un peu plus longtemps. Cela permettra aussi aux
jeunes de me rattraper. Maintenant, ils ne sont plus que trois (Ronan,
Lucie et Pierre). Je fais donc une bonne partie du chemin avec eux.
L'un d'eux (Pierre) est expert pour décoder le langage de Georges Véron
(l'auteur du guide de la HRP). Pour lui, tout est clair et il ne tarit
pas d'éloges sur le sujet.
Finalement
cette étape s'est révélée facile et nous arrivons tous les quatre
ensemble au village des Aldudes vers 17h. Nous prenons ensemble une
bière au café de la place. Là nous apprenons que nous pourrons camper
derrière la station service qui fait aussi supermarché.
Nous
sommes très bien accueillis par la gérante du camping, station service,
supermarché. Le camping sera gratuit parce que les douches ne
fonctionnent pas. Il n'y a que des WC et des lavabos. La clef des WC
nous sera confiée pour la nuit car les WC servent aussi pour le
stockage des articles du supermarché. La confiance règne d'autant que
si nous partions avant 8h, il nous faudrait laisser la clef derrière le
pot de fleurs.
Nous
nous faisons la réflexion que le pays Basque est peuplé de gens très
accueillants. Toujours, nous avons été bien reçus.
Tout
va
bien donc, nous avons un terrain de camping, de quoi nous
réapprovisionner, il n'y a que le temps qui ne soit pas au beau fixe.
Les nuages s'amoncellent et durant la nuit, il pleut.
12 Juillet 2008 - Les
Aldudes -> Béhérobie
Mes nouveaux amis... entre deux averses.
Après avoir pris le
petit
déjeuner et plié la tente mouillée, je pars un peu avant 8h sous un
ciel menaçant. Je laisse mes compagnons sans les avoir vus. Il sont
restés terrés dans leurs tentes, je ne les reverrai d'ailleurs plus
jamais (s'ils me lisent, j'aimerais bien savoir ce qui leur est arrivé
par la suite).
La journée se passe sous
la pluie avec quelques éclaircies principalement sur l'Espagne qui
semble conserver un ciel bleu.
C'est au cours de cette
journée aussi que je rencontre ceux qui seront pendant plusieurs jours
mes compagnons de route: Albert et Olivier (voir photo). C'est avec eux
que je vivrai ce qui sera une de mes pires journées sur le chemin de la
HRP. En effet, ce soir là vers 19h nous marchions encore d'un bon pas
(11h après notre départ) sur une route vers Béhérobie qui devait se
trouver à une bonne dizaine de kilomètres. Nous étions transis,
trempés, le moral dans les godillots quand soudain un miracle se
produisit (il est vrai que Lourdes n'est pas loin). Une dame, en
voiture avec ses deux enfants s'arrête et nous propose de nous emmener
jusqu'au village. Comment refuser bien que ce soit contraire à nos
principes? Je remercie encore cette dame pour sa gentillesse.
C'est donc en voiture,
toujours trempés malgré le chauffage à fond dans la voiture que nous
arrivons devant l'hôtel "Sources de la Nive". Là, malheureusement, il
n'y a plus de place mais notre hôtelier téléphone à son collègue qui
possède un hôtel à quelques kilomètres de là et nous rassure en nous
disant que l'on vient nous chercher. Nous voilà sauvés grâce à
l'amabilité de tous ces gens qui ont fait le maximum pour nous rendre
la vie plus douce.
Quelques minutes plus
tard, une voiture s'arrête et nous emmène à l'hôtel "Larramendy" à
Esterencuby. Je pense que ce n'est pas partout que l'on peut avoir un
tel accueil. Je dois ajouter qu'en plus, le repas était excellent et
tout ça pour un prix raisonnable. C'est donc avec un moral revenu au
beau fixe que je me couche après avoir étendu partout dans ma chambre
mes affaires à sécher.
13 Juillet 2008 - Béhérobie -> Chalets
d'Iraty
Dans le froid et le vent à la
frontière espagnole.
C'est encore sous les
nuages que nous sommes partis ce matin, mais ça devrait s'améliorer.
Cette étape est longue et comporte un total des montées de plus de 1800
mètres. Toutefois après notre journée d'hier elle nous semblera facile.
Nous faisons une halte bières au "Chalet Pédro", ce
n'est pas chose commune car peu de fois notre route passe par des
villages ou des villes. Une bonne partie de l'étape se fait sur la
route. Elle est peu passante mais nous préférons les chemins. On se
sent plus en sécurité et surtout plus en contact avec la nature.
Nous arrivons au terme
de
notre étape "Les chalets d'Iraty"vers 19h. Il s'agit d'un col avec
une route et bien sûr des voitures, des arbres, des endroits pour le
pique-nique, un hôtel pour randonneur (appelé aussi refuge), un restaurant-épicerie,
enfin tout ce qu'il faut (c'est même un peu trop!). Comme on n'a pas le
droit d'y planter la tente, nous optons pour le refuge qui nous offre
une chambre rien que pour nous trois. Encore une nuit sur un matelas,
c'est trop... Mes amis sortent leur nourriture de leurs sacs (le
lyophilisé c'est leur truc, ils m'ont promis de m'y faire goûter un
jour) et moi, égoïstement je ne peux résister à la tentation de la
carte du restaurant.
14 juillet 2008 - Chalets
d'Iraty -> Abri d'Ardané
Une petite maison au milieu des vaches.
C'était
une petite étape sans histoires. Mon corps commence à s'habituer, j'ai
moins mal au dos et j'ai maintenant beaucoup de plaisir à marcher. J'ai
toutefois beaucoup de mal à suivre mes amis dans les montées. L'un est
beaucoup plus jeune, l'autre beaucoup mieux entraîné. Albert est un
habitué des exploits sportifs. Il aime se faire mal. Son dernier truc
en date c'est le marathon des sables (250km en 6 jours soit un marathon
par jour) qu'il a couru au mois de mars. Inutile de dire que je ne fais
pas le poids.
Le
parcours suit les crêtes sur la frontière espagnole. C'est un chemin
herbeux qui monte et qui descend, ponctué de palombières (ces abris
pour chasseurs destinés à "observer" le passage des pigeons voyageurs).
Le
temps
est toujours nuageux mais il ne pleut pas.
L'abri
d'Ardané est un abri pour un douzaine de personnes. Un autre groupe de
randonneurs est déjà là. Je préfère la quiétude de ma tente parmi les
vaches (et les bouses). Les vaches sont un peu bruyantes (à cause des
cloches) mais dès que la nuit tombe, elles se couchent et le silence
revient. Elles, au moins ne ronflent pas.
Au petit matin, à côté de ma tente, le réveil
des vaches.
15 juillet 2008 - Abri d'Ardané ->
Pierre Saint Martin
Le beau temps est revenu
C'est
encore dans la première partie de l'étape une suite de crêtes avec des
pâturages, des vaches, des bouses, des pentes qui montent et d'autres
qui descendent. La vie est belle, il fait beau. Ensuite, c'est la route
presque jusqu'à l'arrivée. C'est un peu monotone mais moins fatiguant
pour les jambes.
Nous
commençons à rencontrer des paysages karstiques. Il s'agit de roches
blanches très dures qui se dissolvent dans l'eau. Ce sont ces roches
qui forment dans les grottes les fameuses stalactites (qui tombent) et
stalagmites (qui montent). C'est aussi bien sûr la région des grottes
et des gouffres bien connus comme celui célèbre de la Pierre Saint
Martin.
Vers
13h nous nous arrêtons près du superbe refuge Belagua (fermé,
abandonné) pour une petite sieste.
Près du refuge Belagua.
Le
refuge "Jeandel"
domine la station de skis de la Pierre Saint Martin. C'est dire que
d'un côté c'est pas terrible. J'enrage de voir à quel point on défigure
la montagne pour implanter des immeubles qui servent 4 mois de l'année,
des canons à neige qui sont une aberration à une époque ou on prend
conscience que l'on va manquer d'énergie et pour aligner des câbles de
remonte-pentes, tire-fesses et autres (faut faire du sport mais pas
trop se fatiguer quand même..).
C'est
tout de même dans un de ces grands immeubles déserts qu'après avoir
parcouru un dédale de couloirs interminables et d'escaliers vides que
l'on découvre le supermarché pour faire nos provisions.
Le
refuge me permettra de me restaurer copieusement. J'aime bien manger
dans les refuges parce que la cuisine est généralement simple et
copieuse. De plus on apporte un plat pour toute la table. Comme il y a
toujours des randonneurs peu affamés ou au régime (les femmes
généralement) avec un peu de chance il y a du rab (à moins
de tomber avec un autre morfal voire deux à la même table, ça m'est
arrivé). A la fin du repas on nous propose café, pousse-café, thé
etc... et la tisane de mémé qui est une spécialité du refuge.
Encore
une fois nous plantons les tentes à proximité du refuge