23 juillet 2008 - Gavarnie -> Refuge
des Espuguettes
Le matin avant 7h... Les touristes ne sont pas
encore là.
Je suis debout de bonne
heure. J'ai des grands projets, de lessive d'abord puis de
restauration. Avec tous ces pique-niques et repas en refuge, je manque
cruellement de fruits et de laitage. Il me faut pallier à tout ça.
J'assiste aussi au réveil du village de Gavarnie. C'est un curieux
village de quelques 160 habitants qui ne semble vivre que de son
activité touristique. J'y suis allé pour la première fois il y a plus
de 50 ans et depuis il semble que rien n'a changé. Ce que je vois
correspond exactement au souvenir que j'en ai. Pendant la journée c'est
un défilé ininterrompu de chevaux d'ânes et de touristes, les uns sur
les autres, parcourant inlassablement le chemin qui mène du village au
cirque.
J'assiste donc à la mise
en place des équidés avant l'arrivée des cars venant de Lourdes. Dès la
barrière de leur pré ouverte, ils courent tous librement dans la rue
principale pour se rassembler sur la place du village.
Vers midi nous mangeons à
la terrasse du camping et décidons de nous avancer un peu sur la
prochaine étape. Il semble que nous ne soyons plus habitués à être
entourés de tous ces gens qui s'agitent avec leurs véhicules à moteur.
Nous avons soif de nature et de calme.
Nous partons vers 13h 30.
Il fait encore très chaud et nous devons passer de moins de 1400 mètres
à plus de 2000 mètres. Il nous faut 2 heures pour atteindre le refuge.
Olivier
a trouvé un ami devant le refuge...
24 juillet 2008 - Refuge des Espuguettes
-> Héas
La nuit a été un peu
orageuse mais rien de méchant et je pars devant sous un soleil radieux
vers 7h. Je n'arrive pas à faire la grasse matinée sous la tente. Dès
que je suis réveillé, j'ai envie de partir. Je pourrais aujourd'hui car
l'étape est courte puisque nous l'avons commencée hier.
Le lac des Gloriettes.
Vers 11h nous atteignons
le lac des Gloriettes et à 13h nous arrivons au terme de notre étape à
Héas. Là nous entrons dans le premier camping tenu par un couple de
gens âgés. Le camping n'a pas de tarif sauf pour les douches. On donne
ce que l'on veut, mais si on ne donne pas assez, on est traité de
pauvre... Enfin ça nous permet de nous laver et de faire un peu de
lessive.
On a vite fait le tour du
village, un camping, une église, un restaurant et quelques maisons.
L'après-midi est un peu long, c'est le problème quand on arrive trop
tôt.
Vers le soir, le
brouillard monte la vallée. On est encore un peu inquiets pour le
lendemain surtout que l'étape sera longue.
Le cirque de Troumouse vu du
village d'Héas.
25 juillet 2008 - Héas
-> Parzan
En quittant Héas à la pointe du jour.
La
journée commence vers 7h 45 par une grande montée. Nous passons de
moins de 1500m à plus de 2600m au niveau de la hourquette de Héas (une
hourquette est un col en langage gascon) que nous atteignons vers 10h
30.
Vue de la hourquette de Héas.
Ensuite le chemin
redescend et vers 12h 30 nous arrivons au refuge de Barroude près des
lacs du même nom.
Le refuge de Barroude.
Puis c'est la montée
au col de Barroude (2534m) pour passer la frontière espagnole.
Les lacs et le refuge de Barroude vus du col
du même nom.
Albert à l'arrivée au col de Barroude.
Le cirque de Barroude (Barrosa
en espagnol).
C'est
maintenant une descente dans la vallée de Barrosa avant d'atteindre la
route qui nous mène à Parzan.
Nous
n'avons pas de bons souvenirs de Parzan. Nous sommes d'abord accueillis
dans le bar par une jeune serveuse acariâtre. Ensuite, cherchant un
endroit ou dormir nous nous faisons jeter d'un immeuble où nous étions
sensés trouver des chambres d'hôtes. Il semblerait que nous n'ayons pas
respecté le protocole pour entrer. Tous les hôtels sont complets et il
n'y a pas de camping.
Après
avoir fait quelques courses nous reprenons la route en sens inverse à
la recherche d'un endroit pour planter nos tentes. C'est dans des
fourrés à quelques centaines de mètres du hameau que nous trouvons une
place. A part les mouches c'est parfait.
Ma tente dans les fourrés.
26 juillet 2008 - Parzan
-> Viados
La vallée de Urdizeto.
Après avoir repris en
montant la route que nous avons descendue hier sur 1km environ, nous
empruntons une route en terre (une de celles qu'affectionnent les 4x4)
et qui nous mène par la vallée de Urdizeto au "Paso de los Caballos"
(col à 2300m). Rien de bien palpitant jusque là! Ensuite un chemin
redescend souvent sous les arbres jusqu'au fond d'une vallée perdue au
village de Viados. Ici, il n'y a qu'un parking, un centre de vacances
pour enfants et un camping, pas de commerces. Le camping est très bien
et il offre des repas.
Notre campement.
Le soir
je mange au restaurant du camping. Le repas est excellent et copieux.
J'ai été mis à une table avec le seul autre français, les autres sont
tous espagnols. Il est hydro-géologue et travaille pour la ville de
Paris. Nous avons beaucoup parlé, surtout de son travail et d'écologie.
C'était très intéressant et nous avons beaucoup d'idées communes.
27 juillet 2008 - Viados
-> Refuge de la Soula
Les prairies parcemées d'iris sauvages.
Aujourd'hui
c'est simple, le matin on monte (départ 1500m, arrivée 2700m) et
l'après-midi on descend (arrivée 1700m). Le temps est beau et le chemin
est facile. La montée s'effectue d'abord dans des prairies inondées
d'iris sauvages.
Vers 11h
30, on arrive au port d'Aygues Tortes qui est un col sur la frontière
espagnole et on retourne en France.
Vue du col d'Aygues Tortes vers
la France.
Un peu
après 15h, nous arrivons au refuge de la Soula qui se trouve près d'une
centrale électrique. C'est là que nous buvons ensemble une dernière
bière avant de nous séparer. En effet mes amis me quittent. Ils n'ont
pas la chance comme moi de pouvoir disposer de six semaines pour
pouvoir faire tout le parcours.
Un dernier verre...
Je les
accompagne ensuite un bout de chemin vers le parking sur lequel on les
attend. J'ai espoir de pouvoir en me rapprochant de "la civilisation"
téléphoner avec mon portable. Dans les montagnes, il est bien rare de
pouvoir utiliser le téléphone. C'est pas plus mal, on ne peut pas être
dérangés, on vit à l'ancienne.
Après
près de trois semaines avec mes compagnons me revoilà seul. J'aimais
bien leur compagnie mais être seul c'est pas mal non plus, on se sent
plus libre, plus responsable aussi, on est seul pour prendre les
décisions et si ça ne va pas, on ne peut pas accuser les autres.
Je
retourne au refuge, plante la tente, prends une douche puis un bon
repas et au lit... Le moral est au beau fixe.
28 juillet 2008- Refuge de
la Soula -> Refuge du Portillon
En quittant le refuge de la
Soula.
Vers 7h 15, je pars. Cette
étape est assez délicate, en haute montagne. Je m'aperçois qu'étant
seul, je suis beaucoup plus attentif, non seulement pour l'orientation
mais aussi à chaque pas. Il est bien évident que je n'ai pas droit à
l'erreur. Il arrive souvent que dans ces étapes en altitude, on passe
des journées entières sans rencontrer personne. Je trouve cela assez
excitant et finalement je pense que l'on donne souvent comme conseil de
ne jamais partir seul en montagne, mais qu'en fait si l'on est
conscient des dangers on est aussi beaucoup plus prudent quand on est
seul. C'est vrai en ce qui me concerne.
Mon chemin doit me mener
au col des Gourgs Blancs à près de 2900m, soit 1200m de montée. Vers
9h, j'atteins le lac de Caillauas (2160m).
Le lac de Caillauas
Puis le lac des Iclots...
Lac des Iclots avec son île.
Ensuite,
c'est la neige. J'arrive en vue du col des Gourgs Blancs. On dirait que
le temps se couvre un peu.
Col des Gourgs Blancs (2877m).
On a alors une vue
plongeante sur le lac Glacé.
Lac Glacé.
C'est
ensuite le col du Pluviomètre.
Col du Pluviomètre.
Enfin,
je descends vers le lac du Portillon auprès duquel est situé le refuge
du même nom. Le vent s'est levé et j'ai bien du mal à amarrer ma tente
plus que la planter car le sol est très caillouteux. Ensuite, le repas
pour une fois n'est pas terrible, en plus, à table, je suis coincé
entre un groupe d'espagnols et deux belges (un Wallon et un Flamand)
qui parlent Flamand.
La nuit
est un peu agitée. Le vent souffle en rafales et une pluie d'orage
s'abat pendant plus d'une heure. Encore une fois, je suis inquiet pour
le lendemain. Je dois passer le col de Literola à près de 3000m.
Camping près du lac du Portillon.
Lac du Portillon et au fond, le
col de Literola.
29 juillet 2008 - Refuge
du Portillon -> Refuge de la Renclusa
En partant vers le col de Literola...
Malgré l'orage de cette nuit, ma tente a bien résisté, pas une goutte
d'eau à l'intérieur. Par contre, je suis assez inquiet pour la journée
à venir. En regardant le col, je vois les nuages poussés par le vent
traverser à toute allure. Par moment, le temps est clair et l'instant
d'après on ne distingue plus la montagne. Autre question: Quelle
température fait-il là-haut? Ici il ne fait pas trop froid mais en
montagne selon le degré d'humidité, on perd entre 0,6° et 0,7° tous les
100m. S'il gèle là-haut, je devrai attendre le dégel ou redescendre. En
effet, mon guide indique que la descente de l'autre côté est assez
raide. Hors, je n'ai pas de crampons.
Bon,
on verra bien! De toute façon, je n'ai rien d'autre à faire.
Après
avoir pris le petit déjeuner au refuge et interrogé le gardien (qui
reste très évasif), vers 8h, je traverse le barrage et commence mon
ascension. Au fur et à mesure que je monte, les rafales de vent sont de
plus en plus violentes et m'obligent à monter presque à quatre pattes.
En approchant du col, je suis de plus en plus souvent enveloppé de
brouillard mais entre deux nuages, parfois, le soleil se montre.
Vers
9h 30, j'arrive au col. J'ai du mal à voir au delà de 10m, mais la
neige n'est pas gelée, il fait plutôt doux. J'attends donc une
éclaircie qui heureusement ne se fait pas trop attendre. La pente est
assez raide. J'ai mis mes gants et mon piolet et je me lance dans la
descente. En ce qui concerne les nuages, le scénario est le même qu'à
la montée avec le vent en moins. Tout va bien, il y a des traces
fraîches, je les suis mais vers la fin de la descente, les traces se
perdent et je suis dans le brouillard. Mon GPS ne m'est pas d'une
grande aide car je suis en Espagne et je n'ai pas la carte espagnole.
Je vois simplement la direction du prochain point de passage que j'ai
programmé, qui est assez loin. Au bout d'un moment, je m'aperçois que
je fais fausse route et je reviens sur mes pas. Il me faut ensuite
attendre une nouvelle éclaircie pour continuer.
De l'autre côté du col.
Les
nuages se dispersent bientôt et je peux voir les montagnes qui
m'entourent. Je finis par me repérer et je peux reprendre le bon chemin.
Ma
route passe par une crête où je rencontre un autre randonneur
solitaire. J'engage la conversation. Il est Ecossais. Il fait lui aussi
la HRP (version anglaise, car il a un guide anglais dont la route
diffère quelques peu du guide de Georges Véron que j'utilise). Nous
décidons de faire route ensemble. Je suis heureux de cette rencontre.
Je vais pouvoir pratiquer l'anglais (il parle très peu français), ce
qui va m'aider pour mon projet de l'année prochaine. Il est très
sympathique.
Au
bout de quelques minutes, il se présente: "Bernie". J'en fais de même
sans oublier le sempiternel "Nice to meet you!".
La
descente est maintenant facile. Il n'y a plus de brouillard et vers
13h, nous arrivons à l'Hospital de Benasque. C'est une belle auberge où
nous décidons d'arroser la moitié de notre randonnée. Nous venons en
effet de dépasser la moitié de la 21ème étape sur 41. Évidemment, en
plus des bières on commande assiettes de crudités et pizzas...
Certains m'ont dit que dans mon récit, je parle souvent de manger. Je
dois avouer que la nourriture est un de mes soucis principaux. Les
points de ravitaillements sont rares. Si on veut emporter de la
nourriture, il faut additionner les kilos dans le sac. Autrement, c'est
le restaurant ou le refuge et ça c'est souvent une seule fois par jour.
Il est rare comme aujourd'hui de trouver un lieu de restauration en
milieu de journée. Le résultat, en ce qui me concerne, est un état de
faim permanent. Il faut quand même savoir qu'il faudrait entre 3000 et
4000 calories par jour en randonnée et que 100g de pâtes sèches
n'apportent que 350 calories. En faisant mes comptes, il faudrait que
je "bouffe" 1kg de pâtes par jour.
En vue de l'hospîtal de Benasque.
Cette
petite parenthèse fermée, nous continuons notre route relativement
repus. J'ai pu également entrer en contact téléphonique avec la
famille. Tout va bien.